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Médicaments inutiles, toxiques et hors de prix – Exemple 12 : l’Afitinor* (évérolimus) a-t-il un véritable intérêt dans le traitement du cancer du sein avancé de la femme ménopausée ?

L’Afinitor* [1](évérolimus) a-t-il un véritable intérêt dans le traitement du cancer du sein avancé de la femme ménopausée ?

L’histoire de l’Afitinor (évérolimus) et du cancer du sein montre la faible efficacité des agences du médicament à n’autoriser que les médicaments utiles et celle du ministère de la santé dans les décisions de remboursement et de fixation des prix.

L ’Afinitor* est un inhibiteur du système Mtor, susceptible de ralentir la croissance des cancers, en particulier du cancer du sein. Il a bénéficié d’une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) aux Etats-Unis 2012 et au Canada le 11 mars 2013 sur la foi de l’étude pivot Boléro 2[2].

Echec seul contre placebo sur la durée de vie

Cette étude – basée sur 724 patientes avec un suivi en médian 18 mois- affirmait que son administration augmentait de 4 mois la stabilisation tumorale (7,8 vs 3,2) par rapport au placebo (aucun traitement actif) sans préciser l’effet sur la survie globale des malades. Deux ans plus tard, une actualisation des résultats montrait que l’évérolimus n’apportait aucun gain de survie globale [3].

Echec avec taxol et avastin

Le laboratoire a tenté d’étendre l’indication de son produit en première ligne thérapeutique en association avec paclitaxel/bevacizumab. Mais ce fut là aussi un échec : l’ajout d’évérolimus n’a pas permis d’améliorer la durée de survie sans progression [4].

Echec avec Herceptine et vinorelbine

Le laboratoire a tenté d’étendre l’indication de son produit en deuxième ou troisième ligne en association avec trastuzumab et vinorelbine. Une prolongation de 42 jours de la « durée de survie sans progression » (=stabilisation tumorale) a été observée (7 mois vs 5.8), mais sans aucune amélioration significative de la survie globale [5].

Au total, aucun essai randomisé, afinitor n’a pu démontré qu’il pouvait apporter un gain de survie globale aux malades ménopausées, atteintes de cancer du sein avancé ou métastatique.

Bénéfices- risques

De plus, pour juger de l’utilité clinique de Afitinor pour les malades, on ne doit pas considérer seulement son efficacité ( en l’occurrence très mineure), mais aussi la mettre en balance avec ses risques et inconvénients qui diminuent la qualité de vie et peuvent également la raccourcir en cas de complications létales.

Les malades traités par Afitinor souffrent en effet de stomatite (59%), de rash (39%), de fatigue intense (37%), de diarrhée (34%), de nausées (31%), et d’une perte de l’appétit (31%).

Surtout la moitié des patientes souffrent de complications sévères (de degré 3 ou 4) imposant l’arrêt du traitement chez 24% d’entre eux.

Les effets secondaires graves comprennent : des pneumopathies non infectieuses (pneumopathie interstitielle); des infections; des insuffisances rénales. la réactivation de l’hépatite B et des embolies pulmonaires[6].

Ces complications entraînent la mort de 2% des malades traités.

 

Considérant l’absence de gain de survie globale et l’impact défavorable de la toxicité sur la qualité de vie, l’avis de la haute autorité de santé[7] : « AFINITOR associé à l’exémestane apporte une amélioration du service médical rendu mineure (ASMR IV) chez les femmes ménopausées sans atteinte viscérale symptomatique, dès récidive ou progression de la maladie » parait très indulgent.[8]

 

La défaillance des agences de régulation FDA et EMA qui ont délivré l’autorisation de mise sur le marché d’un médicament toxique incapable d’augmenter significativement la survie des malades, et qui n’ont pas su la remettre en cause est attristante. La mise sur le marché précipitée de drogues innovantes n’apporte trop souvent, comme ici aucun bénéfice réel pour les malades.

Il est indispensable que les agences de régulation reviennent à la mission pour laquelle elles ont été créées : la protection des populations. Un médicament ne doit être mis sur le marché que s’il est utile (cliniquement efficace pour les malades) et non dangereux.

La responsabilité de nos décideurs politiques est considérable. En France, le ministère doit commercialiser la drogue lorsque l’agence européenne l’a autorisé.
Il décide du remboursement éventuel et fixe les prix. Le NICE anglais ne recommande pas l’afinitor, car le maigre bénéfice espéré ne justifie pas son coût élevé, tant financier que médical par la lourdeur des complications.

 

Rien ne justifie la commercialisation à des prix très élevés pour des drogues peu efficaces et dangereuses. Dans les négociations avec les firmes, le ministère dispose d’une arme absolue : la licence obligatoire prévue dans les accords de l’OMC : en cas de médicament considéré comme vital par les « experts », tout gouvernement peut suspendre l’application du brevet pour permettre à sa population de bénéficier des traitements à un prix supportable. Le coût d’un traitement par afinitor* atteint plus de 36000 € par an et par patient. Le prix des médicaments nouveaux menace notre système de protection sociale, notre compétitivité industrielle (du fait des charges sociales qu’il contribue à augmenter), et la vitalité de notre économie par les prélèvements obligatoires supplémentaires des mutuelles santé et du remboursement de la dette sociale, qui assèchent le pouvoir d’achat de la population. Depuis plus de 15 ans, avec la mise en place des plans cancers et le remboursement à 100% hors budget global des hôpitaux, ils ruinent la sécurité sociale par une politique aberrante (ou complice ?) de prix. Incompétence ? Manque de courage politique ? Corruption ? Quelle qu’en soit la raison, cette politique du « tout pour big pharma », si on la poursuit entrainera à terme la disparition de la sécurité sociale et entre temps fait perdre des chances de survie aux malades auxquels on impose trop souvent l’usage de ces drogues « nouvelles » peu efficaces et à haut risque de complications graves, en lieu et place des traitements éprouvés. A nous tous, médecins, soignants, patients et citoyens d’imposer un retour au bon sens.

 

[1] Commission de la transparence HAS

AVIS 3 avril 2013

AFINITOR 5 mg, comprimé Boîte de 30 (CIP : 34009 396 281 1 0) AFINITOR 10 mg, comprimé Boîte de 30 (CIP : 34009 396 282 8 8)

Laboratoire NOVARTIS PHARMA S.A.S

DCI évérolimus

Code ATC (année) L01XE10 (inhibiteur de protéine kinase)

Motif de l’examen Extension d’indication

Listes concernées

Sécurité Sociale (CSS L.162-17) Collectivités (CSP L.5123-2)

Indication concernée

« Afinitor est indiqué dans le traitement du cancer du sein avancé avec récepteurs hormonaux positifs, HER2/neu négatif, en association avec l’exémestane, chez les femmes ménopausées sans atteinte viscérale symptomatique dès récidive ou progression de la maladie et précédemment traitées par un inhibiteur non-stéroïdien de l’aromatase »

[2] Baselga J et al (2012). Everolimus in postmenopausal hormone receptor-positive advanced breast cancer. N Engl JMed 366, 520–529.

[3] M. Piccart Everolimus plus exemestane for hormonereceptor- positive, human epidermal growth factor receptor-2-negative advanced breast cancer: overall survival results from BOLERO-2† Annals of Oncology 25: 2357–2362, 2014

[4] Yardley DA Paclitaxel, bevacizumab, and everolimus/placebo as first-line treatment for patients with metastatic HER2-negative breast cancer: a randomized placebo-controlled phase II trial of the Sarah Cannon Research Institute. Breast Cancer Res Treat. 2015 Nov;154(1):89-97.

[5] André F. Everolimus for women with trastuzumab-resistant, HER2-positive, advanced breast cancer (BOLERO-3): a randomised, double-blind, placebo-controlled phase 3 trial. Lancet Oncol. 2014 May;15(6):580-91

[6] Afi santé Canada 2015

[7] HAS Afitinor avis du 15 avril 2015

[8] ttps://www.vidal.fr/Medicament/afinitor-94752-prescription_delivrance_prise_en_charge.htm

LISTE I

Médicament soumis à prescription hospitalière.
Prescription réservée aux spécialistes en oncologie ou en hématologie, ou aux médecins compétents en cancérologie.
Médicament nécessitant une surveillance particulière pendant le traitement.
AMM EU/1/09/538/009 ; CIP 3400926788414 (RCP rév 26.05.2016) cp à 2,5 mg.
EU/1/09/538/001 ; CIP 3400939628110 (RCP rév 26.05.2016) cp à 5 mg.
EU/1/09/538/004 ; CIP 3400939628288 (RCP rév 26.05.2016) cp à 10 mg.
Prix : 1408,95 euros (30 comprimés à 2,5 mg).
2716,59 euros (30 comprimés à 5 mg).
3500,11 euros (30 comprimés à 10 mg).
Remb Séc soc à 100 % et Collect dans les indications suivantes :

·       cancer du sein avancé avec récepteurs hormonaux positifs ;

·       tumeurs neuroendocrines d’origine pancréatique ;

·       cancer du rein.

Non remb Séc soc et non agréé Collect dans l’indication « tumeurs neuroendocrines d’origine gastro-intestinale ou pulmonaire » à la date du 09.06.16 (demandes à l’étude).

 

Des informations détaillées sur ce médicament sont disponibles sur le site internet de l’Agence européenne des médicaments : http://www.ema.europa.eu.